4 décembre ◊ Traces
Traces de temps, traces de
mémoires, traces d’êtres perdus, oubliés, traces de pensées, de souvenirs, de
réflexions, et qui perdurent à travers des objets, des livres, des carnets de
notes noircis.
Trois courts métrages autour de
ce thème, tous un brin nostalgiques, mélancoliques. Que reste t-il du passé, de
nos ancêtres? Des objets, transmis de générations en générations, des mots,
ordonnés dans des livres, eux-mêmes classés dans des allées de bibliothèques; des
agendas, émaillés de quotidien. Trois visions poétiques de ces bribes de temps
qui nous parviennent au détour d’une poupée retrouvée, d’un manuscrit oublié,
d’une carte postale égarée. Sommes de moments de vies, ces éléments conservent
une partie de nous-mêmes.
Pour ne rien oublier, M. M, dans
le documentaire d’Isabelle BERTELLETTI retranscrit les petites choses de son
quotidien. Ses émissions télé, ses parents, les courses au supermarché, son
travail à l’IGN, sa jaunisse, les cartes postales d’une femme qu’il aurait pu
aimer. Une année dans la vie bien rangée d’un vieux garçon, 12 mois découpés en
13 douches. Cette année, c’est 1968. Derrière l’ordre apparent de sa petite vie
routinière, dans laquelle déplacer un cadre fait figure d’événement, le
désordre national, le chaos et la révolte pointent à travers quelques remarques
détachées.
Un homme anonyme, une existence anodine, commune et pourtant
tellement poignante.
«Cela me touche beaucoup», «c’est
merveilleux», telles sont les remarques qui ponctuent la fin de la diffusion.
Cependant, contrairement à Jérôme
et Sylvie dans Les Choses de Pérec, qui sont définis par leur désir de
possession, ou au Monsieur José de Tous les noms de Saramago, qui lui,
agit, (deux romans évoqués lors du débat), M. M reste détaché. Il est traversé
par les événements qui grondent à l’extérieur, au-delà de la résignation, on ne
s’attend même pas à ce qu’il prononce le fameux «I would prefer not to» du Bartleby de Melville.
Le temps s’enfuit, les objets
aimés deviennent épaves, le vernis s’écaille, comme sur les ongles des lycéennes
du court métrage réalisé par l’association Polly Maggoo. Et ce M. M, personnage
réduit à une lettre, et dont il ne subsiste que quelques traces de crayon, bien
évident, c’est nous.
«Nous sommes des
contes contant des contes, rien» Fernando Pessoa.
Laureline Boukobza
1 commentaire:
Quelle belle description de l'ambiance de la journée...
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